3.1 Les représentations des signaux CF

Les signaux CF sont obtenus par balayage de la surface de la pièce. La sonde effectue de faibles déplacements, suivant les deux axes ⃗i et ⃗j, définis à la section 2.4, du plan de la surface, de 100 μm dans le cas des bobines micromoulées (décrites à la sous-section 2.2.2) ou de 200 μm dans le cas des microbobines CI (décrites à la sous-section 2.2.1). À chaque position de la sonde, une mesure complexe de la transimpédance de la sonde est réalisée, comme expliqué à la sous-section 1.3.1.2, c’est-à-dire le rapport en amplitude et en phase de la tension de réception sur le courant d’émission. Une cartographie est ainsi constituée, appelée « signal CF ». Cette cartographie de valeurs complexes est échantillonnée dans l’espace, avec un pas correspondant aux distances de déplacement, pas ici relativement faible par rapport à la taille des microbobines, d’un facteur de division respectif 10 ou 15 pour les bobines micromoulées ou les microbobines CI.

Cette section décrit les différentes représentations possibles pour des signaux CF. L’étude porte sur 30 défauts calibrés ; les acquisitions ont été faites par deux sondes comportant des microbobines de deux technologies différentes, avec 5 stratégies d’émission-réception, pour une dizaine de fréquences différentes, selon deux positionnements de la pièce (cf. ci-après, section 3.2). La base de données acquise compte environ 30 × 2 × 5 × 10 × 2 = 6000 signaux CF : il est à la fois inutile et impossible de tous les représenter. Les figures suivantes montreront des exemples obtenus à partir d’un unique défaut, de dimensions 200 μm × 400 μm × 100 μm en profondeur×longueur×largeur. Ce défaut sera nommé ci-après défaut « exemple ».

3.1.1 Une première représentation : le C-scan

3.1.1.1 Exemples de C-scan

Une première façon de visualiser les signaux CF mesurés est la représentation en tant que cartographie complexe. Il s’agit, afin de prendre en compte la nature complexe du signal, d’un ensemble de deux images. Elles affichent soit le couple module / argument, soit le couple partie réelle / partie imaginaire. Cette représentation est souvent appelée C-scan (cf. encadré). Chaque image représente la valeur de la grandeur correspondante suivant une échelle de couleurs qui peut être ou non notée à côté, continue ou discrète. En général l’échelle de couleurs fait correspondre les valeurs par ordre croissant à une échelle allant des couleurs froides aux couleurs chaudes, ou bien s’éclaircissant dans une même teinte. Les axes des images sont les axes ⃗i et ⃗j de balayage de la surface inspectée (vue suivant l’axe ⃗k).


Les dénominations A-scan, B-scan et C-scan (de l’anglais to scan, lire rapidement un document pour y trouver une information) viennent du domaine du CND par ultrasons. Avec cette technologie, il est possible de représenter l’amplitude du signal en fonction du temps à un endroit donné, afin de visualiser le phénomène d’écho propre à l’émission-réception d’ultrasons. Cela constitue la forme A-scan. Un graphe de type B-scan trace la dynamique (le maximum de l’amplitude au bout d’un temps assez long) d’un signal en fonction de son abscisse le long d’une ligne. Il s’agit en quelque sorte d’une vue en coupe le long de cette ligne. Un C-scan est une image à part entière qui représente la dynamique en tout point de la surface, selon une échelle de couleurs qui peut être continue ou binaire. Ceci est par conséquent équivalent à une « vue de dessus ». La figure 3.1 schématise ces trois types de représentations dans le cas d’une évaluation par sonde à ultrasons.

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Fig. 3.1: Dénominations A-scan, B-scan, C-scan pour le CND par ultrasons

Avec la technique CF, les A-scans n’existent qu’en «courants pulsés», fonctionnement peu utilisé en pratique et non exposé précédemment. En régime harmonique, la mesure effectuée à chaque point n’est pas un signal dépendant du temps (le régime transitoire d’établissement de la mesure n’apporte a priori aucune information). Par contre, les représentations B-scan et C-scan de l’amplitude du signal existent et sont largement utilisées. Pour les travaux présentés dans ce mémoire, l’importance de balayer des surfaces élimine de fait la pertinence des B-scans.


Les figures 3.2 et 3.31 montrent les signaux CF acquis autour du défaut « exemple » pour les deux technologies de microbobines présentées aux sections 2.2.1 et 2.2.2. Ces acquisitions sont effectuées avec la stratégie d’émission-réception ERE- et à une fréquence des courants d’émission de 4 MHz. Les contours du défaut sont superposés en pointillés, à l’échelle. Chaque figure est composée de quatre images, dont deux suffisent à représenter entièrement le signal CF. Le pas spatial de balayage choisi est 200 μm dans le cas des microbobines CI et 100 μm dans le cas des bobines micromoulées.

Malgré le caractère différentiel des mesures faites par la stratégie ERE- utilisée ici, la valeur du signal CF loin du défaut n’est pas nulle. Des paramètres perturbateurs, comme les dissymétries entre les bobines ou la connectique, engendrent aux fréquences de mesure (entre 1 et 10 MHz) des tensions très faibles qui, divisées par la valeur du courant d’excitation lui aussi très faible, produisent cette valeur « à vide » non nulle. Ceci engendre visuellement une différence très nette entre les modules des figures 3.2 et 3.3. Cependant, cette valeur à vide est sans effet sur la suite des traitements, car retranchée juste après l’acquisition.


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Fig. 3.2: Signal CF complexe obtenu avec la sonde à microbobines CI connectées selon la stratégie ERE-, à 4 MHz, pour le défaut « exemple », d’une longueur de 200 μm suivant l’axe ⃗i , d’une profondeur de 400 μm et d’une largeur de 100 μm suivant l’axe ⃗j (superposé en pointillés)



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Fig. 3.3: Signal CF complexe obtenu avec la sonde à bobines micromoulées connectées selon la stratégie ERE-, à 7 MHz, pour le défaut « exemple », d’une longueur de 200 μm suivant l’axe ⃗i , d’une profondeur de 400 μm et d’une largeur de 100 μm suivant l’axe ⃗j (superposé en pointillés)


3.1.1.2 Interprétation

La première chose remarquable à la vue de ces images est leur très faible correspondance avec la géométrie du défaut. Le défaut originel, vu selon l’axe ⃗
k, a la forme d’un rectangle horizontal. Pourtant sur ces images, ce sont deux lobes de forme ellipsoïdale qui sont visibles. De plus, la dimension des ellipses n’a aucun rapport avec celle du défaut, car les acquisitions sur d’autres défauts donnent des lobes de dimensions similaires, mais tend à se rapprocher davantage de la longueur du côté de chaque type de microbobine (environ 2,5 mm pour les acquisitions issues des microbobines CI, environ 0,9 mm pour celles issues des bobines micromoulées). Les zones contenant les lobes seront dans la suite nommées « zones de signal utile ».

La présence de ces lobes signifie que le signal CF subit une variation non seulement lorsque le défaut est situé sous le récepteur, mais aussi lorsqu’il est situé sous l’un des deux émetteurs. La figure 3.4 schématise quelques positions des trois microbobines composant la sonde par rapport au défaut, pour quelques exemples repérés sur un C-scan. Lorsque le défaut se situe sous la partie gauche de l’émetteur de droite (position a), les lignes de courants induits de cet inducteur sont déviées vers la microbobine centrale de réception. Les courants induits par l’inducteur de gauche ne sont par contre pas déviés, l’équilibre est rompu et la tension aux bornes de la microbobine centrale n’est pas nulle. Si le défaut se trouve sous la partie droite de la microbobine réceptrice (position b), une variation équivalente du signal CF est observée, pour la même raison. Cette variation est située de part et d’autre de la frontière entre la microbobine centrale et la microbobine de droite. Le maximum de cette variation est atteint lorsque le défaut se situe entre les centres de chacune des deux microbobines (position c). Sur la droite de symétrie de la sonde parallèle à l’axe ⃗j (positions d et e), l’influence du défaut est identique pour les CF induits par les deux émetteurs et le signal CF est nul. Aux limites des microbobines parallèlement à l’axe ⃗j (position f ), le signal s’atténue très fortement, car les déviations sont trop éloignés pour engendrer une variation importante de la tension aux bornes de la microbobine de réception. Enfin, dans les parties externes des microbobines émettrices (position g), les courants induits sont déviés vers l’extérieur de la sonde, ce qui ne produit aucun signal.


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Fig. 3.4: Schéma représentant pour quelques points de mesure la position de la sonde par rapport au défaut


Ainsi, la zone d’influence du défaut est située autour des frontières entre chaque microbobine émettrice et la microbobine réceptrice (et non uniquement la surface de la zone réceptrice comme il pourrait être attendu). Ceci est une conséquence des petites dimensions des défauts considérés, comparativement à celles des microbobines. Dans ce cas, les déviations des CF sont en effet localisées à l’endroit où se trouve le défaut. Dans le cas d’un défaut de plusieurs millimètres de long, le C-scan CF produit ressemble davantage à l’image géométrique du défaut, avec des bordures relativement épaisses.

3.1.1.3 Traitement des images

L’influence des faibles dimensions des défauts peut aussi être expliquée par la théorie des filtres. En posant ni et nj les indices des points de l’image selon les axes ⃗i et ⃗j, il est possible de considérer la sonde comme un filtre de traitement bidimensionnel discret

(n ,n ) ↦→ h(n ,n )
  i j       i  j

qui transforme une image binaire e(ni,nj) contenant le défaut vu selon l’axe ⃗k en l’image constituée par le module du signal CF s(ni,nj) montrée par exemple dans les figures 3.2 ou 3.3. Un tel filtre linéaire2 permet alors d’écrire, sans prendre en compte le bruit extérieur

                         ∑  ∑
s(ni,nj) = (h* e)(ni,nj) =       (h (ni - p,nj - q) e (p,q))
                          p  q
(3.1)

* est l’opérateur de convolution. Il vient alors que les défauts dont les dimensions sont très faibles par rapport à celles de la sonde constituent des impulsions de Dirac de l’ensemble des défauts, c’est à dire des images d’entrée dont l’image de sortie correspondante est proportionnelle à la réponse impulsionnelle du filtre h. Cela correspond bien à la ressemblance des réponses engendrées par tous ces défauts.

La réponse impulsionnelle de la sonde étant ainsi connue grâce à l’acquisition autour d’un défaut de faibles dimensions, il est possible de calculer a priori ce que sera le signal CF pour un défaut de taille importante grâce à la formule précédente. La figure 3.5 montre l’exemple d’un défaut réellement évalué à l’aide de la sonde à microbobines CI et de la convolution de l’image binaire du défaut par la réponse impulsionnelle de la sonde. Le défaut en question est composé de deux fissures perpendiculaires de longueur 4,5 et 5 mm et de largeur 1 mm, espacées par un isthme large de 1,5 mm : le défaut n’a pas une forme triviale. Cette convolution donne une image assez proche de l’image correspondant au module du signal CF réellement obtenue : les arêtes suivant l’axe ⃗j sont très visibles, tandis que les arêtes suivant l’axe ⃗i sont presque invisibles. Seuls les contours des défauts peuvent être détectés, car la structure de la sonde est différentielle.


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Fig. 3.5: Correspondance entre le résultat de la théorie des filtres et l’acquisition réelle : exemple d’un défaut de forme non triviale


Ces signaux peuvent encore être utilisés à des fins de traitement du signal par les algorithmes d’inversion ou de déconvolution. Ces algorithmes ont pour but de réaliser le traitement inverse de celui effectué par la sonde, c’est-à-dire revenir à l’image originale du défaut. Il est souvent question d’utiliser la transformée de Fourier discrète (TFD) de h, notée H. Cette matrice doit être inversée, et la transformée inverse de Fourier de la matrice ainsi obtenue correspond au filtre inverse h-1. La matrice H est rarement inversible, et plusieurs méthodes d’inversion approchée existent. Parmi ces méthodes se trouvent

Il est par conséquent nécessaire d’évaluer ces DSP, c’est-à-dire souvent de les supposer a priori.

Ces deux méthodes ont été mises en œuvre sur les acquisitions effectuées. Les faibles dimensions des défauts considérés ont eu pour conséquence des résultats peu concluants. Néanmoins, trois observations ont pu être dégagées au sujet de ces deux méthodes :

En conclusion, cette approche linéaire permet dans certains cas de proposer efficacement des prétraitements de déconvolution favorisant l’interprétabilité des images CF, mais reste dans le cas général insuffisante pour la caractérisation quantitative des défauts. Il faut alors mettre en œuvre des modèles inverse plus élaborés, qui font actuellement l’objet d’une recherche active.

3.1.2 Une deuxième représentation : la signature complexe

Une deuxième représentation des signaux CF est très utilisée dans le domaine du CND par CF. Il s’agit de la représentation dans le plan complexe de chaque valeur mesurée de la transimpédance. L’abscisse et l’ordonnée correspondent respectivement aux parties réelle et imaginaire de cette grandeur complexe.

Lorsque l’évaluation est effectuée le long d’une ligne uniquement, évaluation qui peut être représentée sous forme de B-scan, il est d’usage de relier les points de mesure entre eux, afin de garder une information spatiale sur l’ordre des points complexes. Ce genre de graphe est alors appelé courbe ou figure de Lissajous. Dans le cas des acquisitions effectuées ici, il est préférable de ne pas lier les points entre eux, afin de garder une certaine lisibilité des graphes. La figure 3.6 montre les signatures obtenues pour le défaut « exemple » avec les deux technologies de microbobines. Chaque croix correspond à un point de mesure (les points de mesure sont espacés sur les deux axes ⃗i et ⃗j de 200 μm pour les acquisitions faites avec la sonde à microbobines CI et de 100 μm dans le cas des bobines micromoulées).


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Fig. 3.6: Signatures complexes obtenues avec le défaut « exemple »


Sur chacune de ces deux signatures, les points centraux correspondent aux mesures hors de la zone de signal utile, loin du défaut. Comme avec la représentation C-scan, cette valeur centrale moyenne est non nulle. Une variation complexe constituée d’un grand nombre de points, symétrique de part et d’autre de cette valeur moyenne, correspond aux lobes des figures 3.2 et 3.3.

Malgré la perte des informations spatiales comme la forme du signal utile, cette représentation offre des nouvelles informations. En particulier, elle permet de mieux visualiser les tendances générales de variation de l’impédance de la sonde, en module et en phase. Ce mode de représentation est souvent choisi comme point de départ pour paramétriser3 l’acquisition, c’est-à-dire réduire à quelques valeurs une signature CF entière[KSK+04]. Une paramétrisation des signatures CF est par exemple l’objet du chapitre 5. Elle y sert à obtenir les dimensions des défauts détectés.

3.1.3 Une (presque-)troisième représentation : l’amplitude principale

3.1.3.1 Intérêt de la transformation

La dernière possibilité pour la représentation des signaux CF n’en est pas vraiment une. Il s’agit des mesures complexes, projetées sur l’axe de plus grande variation de la signature CF et représentées en tant qu’image spatiale. Cela reste une sorte de C-scan, appelée par la suite « image CF ».

L’intérêt de cette représentation est de simplifier la visualisation des images CF des défauts, au prix d’une perte si possible minime d’informations. En effet, comme cela est visible sur les figures 3.2 et 3.3, se contenter d’une image unique par signal CF signifie nécessairement faire un choix entre module, partie réelle et partie imaginaire. Choisir le module pose le problème de l’opposition des valeurs des deux lobes : le module étant toujours positif, l’opposition ne peut être conservée. Les deux dernières grandeurs ne sont pas préférables l’une à l’autre et il est par conséquent difficile d’en choisir arbitrairement une. La plus intéressante des deux serait, d’après les signatures CF des figures 3.6-a et 3.6-b, plutôt la partie imaginaire pour la première, plutôt la partie réelle pour la seconde. L’idée est alors de choisir une combinaison linéaire des deux, qui maximise l’énergie du signal CF conservée. Plusieurs techniques existent pour ce faire.

3.1.3.2 Première méthode : l’analyse en composantes principales

Le terme « amplitude principale » peut être rapporté à la méthode de l’analyse en composantes principales (ACP), qui effectue une comparaison des différentes composantes d’un signal, après projection dans un sous-espace de représentation engendré par une nouvelle base orthogonale[Sap78MKB79]. Cette base orthogonale peut être indifféremment déterminée à l’aide de la décomposition en valeurs singulières[Bjo96] de la matrice de covariance des deux vecteurs partie réelle et partie imaginaire, ou de la matrice dont les colonnes sont ces deux vecteurs. L’effet produit est la maximisation des projections orthogonales des points sur chacun des axes définis. La première composante produite par l’ACP est a priori l’amplitude principale recherchée, du moins pour le type de signaux CF considérés ici.

3.1.3.3 Deuxième méthode : l’estimateur des moindres carrés ordinaires

Une autre méthode est le calcul de l’estimateur des moindres carrés ordinaires (EMCO). Cette méthode permet de minimiser la somme des carrés des erreurs entre les valeurs mesurées et les valeurs estimées[VHV91]. Il s’agit souvent de mesures y réalisées pour un paramètre de mesure x connu : le but est alors de minimiser l’erreur ŷ - y d’estimation. Ces erreurs sont par conséquent les distances verticales entre les points de mesure et la droite trouvée, comme indiqué par la figure 3.7-a.

Dans le cas de cette étude, l’utilisation de l’EMCO est sensiblement différente, car le but est de déterminer l’existence d’une relation entre deux grandeurs mesurées. Il n’y a aucune légitimité à donner un sens physique différent aux parties réelle ou imaginaire de l’impédance, qui jouent respectivement le rôle de x et y. Il convient donc de minimiser ici la distance orthogonale à la droite recherchée, comme le montre la figure 3.7-b.


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Fig. 3.7: Distances ou erreurs pouvant être considérées pour l’estimateur des moindres carrés ordinaires


Le calcul de cette droite prend en compte les n points de mesure de coordonnées (xi,yi). La moyenne des x, la variance des x et la covariance des (x,y) sont respectivement notées

              1 ∑n
       ¯x  =   --   xi
              n i=1
              1 ∑n
    V(x)  =   --   (xi - ¯x)2
              n i=1
              1 ∑n
cov(x,y)  =   n-   (xi - ¯x)(yi - y¯)
                i=1

Pour une droite affine quelconque, d’équation

a x + by + c = 0
(3.2)

a, b et c sont les paramètres à déterminer, la distance algébrique depuis un point de coordonnées (xi,yi) est définie par

di = a-x√i +-byi +-c
         a2 + b2
(3.3)

La somme des carrés des distances entre les n points de mesure et la droite s’écrit

               1   ∑n
Σ(a,b,c)  =  --2---2    (a xi + byi + c)2
            a  + b i=1
               1   [ ∑n                 n∑                    ]
         =  --2---2     (axi + byi)2 + 2    (a xi + b yi) c+ n c2
            a  + b   i=1                 i=1
Sa dérivée partielle par rapport à c vaut
             [                   ]
∂Σ      2     ∑n
∂c-=  a2 +-b2    (axi + byi)+ n c
              i=1

et s’annule si et seulement si

     1-∑n
c = - n   (axi + byi) = - a¯x - b¯y
       i=1

Cela signifie que la droite minimisant l’erreur orthogonale passe par le barycentre (¯x,y¯ ) de l’ensemble des points de mesure. Après substitution, la somme à minimiser s’écrit

                  [ n                         ]
Σ(a,b) =   ---1---  ∑  (a (x - x¯)+ b (y  - ¯y))2
           a2 + b2         i          i
                  [ i=1 n               n                 n                ]
       =   ---1---  a2∑  (x -  ¯x)2 + b2 ∑ (y  - ¯y)2 + 2a b∑  (x  - ¯x)(y - ¯y)
           a2 + b2    i=1  i           i=1  i             i=1   i      i
              n   ( 2         2                   )
       =   a2-+-b2 a  V (x )+ b V (y)+ 2 ab cov(x,y)                              (3.4)
Pour minimiser cette somme, ses dérivées partielles par rapport à a et b sont calculées :
∂ Σ          n    [    2                  ( 3    2 )        ]
∂a-  =   --2---2-2  2ab  (V(x) - V(y))+ 2  b - a  b  cov (x,y)
         (a + b ) [                       (        )         ]
∂-Σ  =   ----n----  2a2b (V(y)-  V(x))+ 2  a3 - ab2  cov(x,y)
 ∂b      (a2 + b2)2
L’annulation de ces deux dérivées engendre la même équation
                   (      )
a b (V (y)- V (x )) + a2 - b2 cov(x,y) = 0
(3.5)

En fixant b, il est possible de calculer la valeur de a par la résolution de l’équation du second degré4, soit

                   ∘ ---------------------------
     V (x)- V (y)±   (V(x) - V(y))2 + 4 cov2(x,y)
a = b-------------------------------------------
                      2 cov (x,y)

La symétrie de l’équation 3.5 donne au calcul équivalent pour b en fixant a un résultat identique. Il est alors envisageable de choisir, par exemple, d’avoir un couple (a,b) normalisé tel que

a2 + b2 = 1  et  b ≥ 0

Les deux solutions trouvées correspondent à deux extrema de la somme S. La solution minimale correspond à une dérivée seconde de S par rapport à a positive. La valeur de cette dérivée seconde, lorsque la dérivée première s’annule, est positive si et seulement si

2a cov(x,y) ≤ b (V(x) - V(y))

Cette inéquation permet de choisir la solution correcte, qui est

        (              ∘ ---------------------------)
          V(x) - V(y)-   (V (x)- V (y))2 + 4 cov2(x,y)
a  =  b ( ------------------------------------------)
                          2 cov(x,y)
   =  bK
ce qui conduit à la solution
       K                 1
a = √------2- et  b = √------2-
     1 + K              1+ K

qui peut être simplifiée5 en

                       ┌ -(---------------------------------)--
                       ││ 1              V (x)- V (y)
a  =  - signe(cov(x,y )) │∘ -(1  - ∘---------------------------)            (3.6)
                         2        (V(x)-  V(y))2 + 4 cov2(x,y)
                       ┌│ -(---------------------------------)--
                       ││ 1              V (x)- V (y)
b  =                   ∘ -(1  + ∘--------------2------------)            (3.7)
                         2        (V(x)-  V(y)) + 4 cov2(x,y)

L’amplitude principale s est l’abscisse de la projection de chaque point de mesure sur la droite déterminée. Cette projection orthogonale s’écrit, à une constante additive près

 ′   bxi---ayi
si = √a2-+--b2- = bxi - a yi

3.1.3.4 Troisième méthode : le maximum de vraisemblance

Une troisième méthode est celle du maximum de vraisemblance. Il y est question de déterminer les paramètres d’une loi de distribution afin de l’optimiser pour l’ensemble des échantillons mesurés[Rao65]. En pratique, il faut trouver une variable aléatoire fonction des mesures effectuées, dont la loi de distribution dépend des paramètres recherchés. Le choix des paramètres est effectué grâce à la maximisation de la vraisemblance qui prend en compte l’ensemble des probabilités pour chacune des mesures.

Ici, les paramètres recherchés sont les coefficients a, b et c de la droite d’équation 3.2. La variable aléatoire choisie est la distance algébrique di définie par l’équation 3.3. Cette distance équivaut à l’erreur commise. Si la distribution de cette variable aléatoire est posée, par hypothèse, comme étant une loi normale centrée et d’écart-type σ, la densité de probabilité de di s’exprime

                          (    2 )
fa,b,c(xi,yi) =   √--1---exp  - di--
                 2π σ        2σ2
En supposant l’indépendance entre les différents échantillons, la vraisemblance est par définition le produit de l’ensemble des n densités de la variable aléatoire prise pour chaque échantillon, soit
                                                (                                )
                                 (   1   )n         1     1    ∑n               2
La,b,c((x1,y1),(x2,y2),...,(xn,yn)) =   √2-πσ--  exp  - 2σ2-a2-+-b2    (axi + b yi + c)
                                                               i=1

Trouver les paramètres a, b et c qui maximisent cette quantité n’est pas chose aisée. Cependant, il est possible d’obtenir les mêmes paramètres en utilisant la fonction logarithme népérien ln. En effet, La,b,c est strictement positive et ln est croissante et monotone. Il vient

                                            (       )               n
ln(L    ((x1,y1),(x2,y2),...,(xn,yn))) =   n ln  √--1---  - -1-----1--- ∑  (a xi + b yi + c)2
    a,b,c                                       2 πσ     2σ2 a2 + b2 i=1
                                            (   1   )    1
                                    =   n ln  √------  - ---2 Σ(a,b,c)
                                               2 πσ     2σ
Σ(a,b,c) est la somme des distances carrées minimisée précédemment pour le calcul de l’EMCO. Il apparaît clair que maximiser la quantité ln (La,b,c) en fonction de a, b et c revient exactement à minimiser Σ(a,b,c). La méthode du maximum de vraisemblance donne, dans le cas étudié, le même résultat que le calcul de l’EMCO.

3.1.3.5 Mise en œuvre

Les résultats donnés par les deux méthodes de calcul (ACP et EMCO) sont numériquement rigoureusement identiques. Ceci est dû à l’utilisation dans le calcul de l’ACP de la covariance des données. Le calcul de l’EMCO faisant lui aussi intervenir les variances et covariances des parties réelles x et imaginaires y, les deux calculs ont un fondement théorique différent mais une mise en œuvre similaire et donnant par conséquent le même résultat.

Une image unique est obtenue, qui maintient la visualisation de la forme géométrique des signaux CF. Les amplitudes principales correspondant au défaut « exemple » sont représentées dans la figure 3.8. La dynamique de ces grandeurs, c’est-à-dire la différence entre les valeurs extrêmes, visible sur les échelles de couleurs, est bien maximisée.


PIC

Fig. 3.8: Amplitudes principales (images CF) obtenues pour le défaut « exemple », à comparer avec les figures 3.2 et 3.3


1On notera que les deux sondes n’ont pas été connectées de façon strictement identique : les deux bornes de la microbobine centrale de réception sont inversées entre les deux sondes, ce qui provoque une opposition sur la tension mesurée, par suite sur la transimpédance (les lobes bleus deviennent rouges et inversement à la fois sur la partie réelle et sur la partie imaginaire).

2La sous-section 1.3.1 explique que le phénomène des courants de Foucault n’est pas linéaire et que les amplitudes des grandeurs d’intérêt ne varient pas linéairement en fonction des perturbations. Cela ne signifie pas qu’il est impossible d’utiliser la théorie des filtres linéaires : il suffit que les théorèmes de superposition et d’invariance par translation soient vérifiés. Si la vérification du deuxième théorème est évidente, l’hypothèse de superposition est souvent faite, par exemple dans le cas de l’hypothèse de Born[Zor90]. En pratique, cette hypothèse est valable dans un domaine de validité restreint[LDJ07].

3Comme beaucoup de termes techniques, le verbe paramétriser est un anglicisme (de l’anglais to parameterize). Il n’est pas correct et il serait préférable en français classique de lui préférer le verbe paramétrer. Néanmoins, l’action en question ici est bien différente de paramétrer au sens régler des paramètres, mais signifie trouver comment définir ces paramètres et étudier comment il est possible de s’en servir. C’est pourquoi utiliser un terme différent n’est pas aberrant.

4Si la quantité cov(x,y) est nulle, l’équation 3.5 est une équation du premier degré à deux variables. Deux cas sont alors possibles :

En pratique, le fait que cov(x,y) = 0 et V(x) = V(y) simultanément est hautement improbable, car dans le cas présent x et y sont fortement dépendantes. cov(x,y) = 0 ne se produit en fait que lorsque l’une des deux données est constante de façon uniforme sur l’ensemble de l’acquisition.

5En posant signe(0) = 1, cette écriture permet de prendre aussi en compte les cas où cov(x,y) = 0 et V(x)V(y).